lundi 7 octobre 2024

Destination Amityville, David Didelot, Editions Faute de Frappe

Je ne sais pas vous, mais moi j’apprécie les gars (et les filles) avec une colonne vertébrale, quelque chose qui les maintient droit et qui charpente leur existence. Si vous vous penchez sur l’ami David , vous trouverez dès le début de ses écrits dans le fameux Vidéotopsie, les germes de sa semence contemporaine : la passion du cinéma Bis (italien de préférence), l'inéffable Bruno Mattei, les femmes qui enflamment sa scopophilie, le goût de la littérature (gore mais pas que), un style singulier, reconnaissable entre mille, bien arqué sur ses deux jambes : la droite innervée par une grammaire, un vocabulaire et une orthographe solidement ancrés dans les classiques et la gauche, imaginative, irrévérencieuse, osée, débridée et férocement impertinente. Parmi les marottes de l’auteur, nous avons tous en mémoire Amityville dont il conta au travers d’un anthologique numéro de Vidéotopsie (l’un de mes favoris, pavé dans la mare au diable) les angoisses fondatrices qui générèrent chez lui son goût immodéré pour cette affaire et ses ramifications littéraires et cinématographiques (mais pas que). Rien d’étonnant alors à ce qu’il croque à nouveau la pomme empoisonnée (d’autant que l’action se déroule à quelques encablures de la grosse… pomme) de l’iconique maison (hantée ? maudite ? suppliciée ? sacrificielle ?) avec un roman. Son nom ? Destination Amityville. Une destination que David avait cochée inconsciemment depuis des lustres (je rappelle qu’un lustre, c’est cinq ans ou un truc qui illumine) dans la constellation de sa vie. Après plusieurs romans, sa manière de narrer continue de me bluffer : récit à tiroirs (pas toujours commode à réaliser) dont les ramifications conduisent les personnages (et le lecteur ébranlé) à l’inexorable fin, les brisant sur les vagues de leur destin tragique (il y a une sorte de déterminisme de l’horreur chez David, un poids quasi divin (ou diabolique) de la mort qui agit comme un aimant sur ces pantins) ; coups de canifs dans la toile cirée des conventions (avec des courtes digressions incisives qui gagnent en efficacité) ; pulsions des corps et des âmes qui amènent à la surface de la réalité les désirs les plus refoulés (sexuels mais pas que) et les instincts les plus terrifiants ; rythme qui avance crescendo vers l’abîme, vers le précipice final mais aussi de la tendresse (eh oui, ce vieux couple qui s’aime par-delà la maladie et l’issue fatale toute proche par exemple), de l’humour (souvent plus que l’on ne le capte à la première lecture) et un amour considérable (et inconsidéré) pour la langue de Molière, pour les mots, pour les phrases. Le roman s’avère passionnant au sens premier du terme, il nous happe, nous captive, nous hante. David DIDELOT nous invite dans un univers qu’il respecte et qui l’habite mais sans en être servile, en toute liberté. Le chaumontais d'adoption, à force de noircir les pages de nos nuits blanches, s’est débarrassé des oripeaux de la bienséance et d’une réserve toute légitime lorsque, comme lui, on a le respect des grands noms du genre chevillé au corps. A mon humble avis, il s’est invité à leur table. Sous nos yeux naît une œuvre, mes amis et je pèse mes mots. Chapeau l’artiste ! David Didelot Destination Amityville (Editions Faute de Frappe) A commander sur le site de l'éditeur (https://www.editionsfautedefrappe.fr/) (D.L)

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